mercredi 1 février 2012

Festins et Ripailles



La collection esprit XVIIIème des éditions du Chêne est un vrai plaisir. Après « Savoir vivre et bonnes manières », « Bons mots et phrases assassines », « Amour et libertinage »…, voici « Festins et Ripailles » qui nous plonge dans les plaisirs de bouche et les rituels de table du XVIIIème siècle. La maquette à l’ancienne du livre avec une couverture imitant le cuire, une typographie précieuse, une tranche d’or nous plonge d’emblée dans ce siècle. Les deux auteurs Nicole Masson et Maguy Ly, à travers les extraits de textes de la correspondance de Voltaire, du Manuel des Officiers de Bouche de Menon, des Mémoires de Saint Simon, de Marivaux, de l’Histoire de Ma vie de Casanova, de divers dictionnaire nous dresse un panorama de la culture gastronomique de cette époque.

Dans une lettre qui date du 21 décembre 1767 à Chabanou, Voltaire écrit les lignes suivantes : « Madame Denis mangera demain vos huîtres. Je pourrai bien en manger aussi, pourvu qu’on les grille. Je trouve qu’il y a je ne sais quoi de barbare à manger un joli petit animal tout cru ! ». Ce point de vue Voltaire nous donne un autre aspect de sa personnalité.

Sur le terme Ripaille, voici la définition du dictionnaire de Richelet. Il parle « d’un lieu agréable en Savoie où le cardinal Amédée de Savoie se retira pour mener une vie délicieuse, et depuis, le mot ripaille a signifié bonne chère, réjouissance, vie pleine de délices et plaisirs et qui est toute dans les festins, les jeux et la bonne chère ».

Sur Friand, le dictionnaire de Féaud donne le texte suivant : « Qui aime les bons morceaux et s’y connait. Il dit quelque chose de moins bas et de plus raffiné que gourmand. En parlant des choses, goût friand, délicat, morceau friand, mets ou morceaux délicat.

Rassurez vous, il n’y a pas que des définitions. Sur un page, on relate les visites à Paris du Czar Pierre 1er en 1717, et ses manières de tables étaient jugées inconcevables face à l’étiquette française.

De même, dans l’Almanach parisien en faveur des étrangers et des personnes étrangères, on vous fournit une liste d’hôtel garnis. Non, il ne s’agit pas de ce que vous pensez. Dans le langage XVIIIème, garni veut dire avec auberge, une bonne table ! C’était déjà un peu l’ancêtre du Michelin.

On s’infiltre dans les comportements de table des grands de ce monde, y compris le roi et la reine. Les critiques ne sont pas tendres ! A lire ces auteurs, on pourrait croire qu'ils passaient leur vie à table. Qu'il s'agisse des repas royaux régis par l'étiquette, des soupers fins souvent libertins, des grands festins aux plats innombrables ou des ripailles prises dans les auberges, les romans, les mémoires du temps et même la poésie fugitive de l'époque en rendent compte. Le " service à la française " et la gastronomie vont bientôt triompher. Mais on commence aussi à " déjeuner sur l'herbe ", les modes se succèdent, truffes, huîtres ou chocolat. Les plaisirs de bouche viennent alors pimenter d'autres plaisirs plus licencieux…

La lecture du livre est très plaisante. En plus de la saveur des mets, je découvre la saveur des mots, des belles phrases construite, l’élégance du verbe. Un régal !

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