« Je m’en
vais, mais l’Etat demeurera toujours ». « Pourquoi pleurez-vous ? Est-ce que vous m’avez cru immortel ?
Pour moi, je ne l’ai jamais cru être ». Ces phrases, prononcées de
manière sereine par le roi Louis XIV agonisant sur son lit de mort, restent à
jamais gravées dans l’histoire. Il meurt comme il a vécu, en représentation le
1er septembre 1715. Ses funérailles, loin d’être occultes, sont l’occasion
de multiples cérémonies, véritables spectacles baroques où les grandeurs du
disparu sont exaltés mais aussi ramenées à leur finitude. C’est cette page de l’histoire
de France que le château de Versailles nous invite à revivre à travers son
exposition « Le Roi est mort »,
de l’agonie du roi jusqu’à la mise en tombeau en la cathédrale de Saint Denis,
avec ses rituels très précis. L’exposition bénéficie d’une scénographie
exceptionnelle signée par le metteur en scène d’opéra Luigi Pizzi dans une mise
en scène très baroque, qui impacte à la fois votre vue et votre écoute.
Situé
dans les salles d’Afrique du château de Versailles, vous êtes accueillis par
deux pylônes ornés de tête de mort, pour accéder à l’escalier de Crimée décoré
de tentures noires, au son de la marche funèbre d’André
Danican Philidot pour arriver devant le catafalque grandiose !
Deux points
ont retenu mon attention, l’autopsie et l’embaumement dans la salle 3 et l’exposition
et effigie dans la salle 4. Le lendemain du décès, le corps du roi était
ouvert, triparti et embaumé selon un rituel fixé dès le moyen-âge. Les viscères
de l’abdomen, du thorax et du crâne étaient extraits puis placés dans un baril
de plomb. Le corps vidé aussi de son cœur était ensuite embaumé en remplissant
les cavités de produits desséchants et odoriférantes (aromates, sel, étoupe)
avant d’être mis dans un cercueil en plomb. Le cœur était à son tour embaumé,
placé dans deux boîtes, l’une en plomb, l’autre en or. Les techniques d’embaument
n’ont pas changé depuis Philippe Le Bel avec des ingrédients dignes d’une
recette de cuisine. Le médecin
légiste Philippe Charlier en donne la composition : « Feuilles de
laurier et de rue, myrte, romarin, sauge, baume, absinthe, marjolaine, hysope,
thym, serpolet, basilic. Racines d'iris, d'angélique, de flambe, de calamus
aromaticus. Fleurs de roses, de camomille, de melilot, de lavande. Écorces de
citrons et d'oranges. Semences d'anis, de fenouil, de coriandre et de cumin.
Une fois le tout inséré, ficeler serré avec ficelles et bandelettes ». Cette
tripartition (corps, entrailles et cœur) permettait au défunt d’avoir trois
lieux distincts de sépulture, possibilité autrefois exploitée par les
souverains de l’Europe comme autant de marquages au service de la construction
territoriale de leurs Etats. Ainsi, à ce jour, le corps du roi se trouve dans
la cathédrale de Saint Denis, ses entrailles à Notre Dame de Paris, son cœur,
dans l’église des jésuites de la rue Saint Antoine à Paris.
Effigie de cire de Louis XIV
Sur l’exposition du
roi défunt, jusqu’à Henri IV en 1610, il était exposé avec une effigie. C’était
un mannequin en bois et en cire aux traits du défunt, vêtue en roi, avec
couronne, sceptre et main de justice. Il était servi par les officiers de
bouche, même pour les repas, comme si celui-ci était toujours vivant ! C’était
Louis XIII qui adopta le modèle espagnol où le véritable corps du roi était
présenté en habit de cour avec les insignes de souveraineté ! La dépouille
de Louis XIV n’était présentée à la vue du public que le jour de son décès. Son
cercueil fermé était exposé dans le salon Mercure avant son grandiose transfert
le 9 septembre 1715 à 20 heures vers la cathédrale de Saint Denis, à la lumière
des flambeaux, au son des tambours et hautbois de la marche composée par
Philidor ! Vous avez encore jusqu’à fin février 2016 pour voir cette
magnifique exposition. Pour plus d’informations, cliquez
ici. J’ai apprécié l’idée aussi que c’était le service des « menus
plaisirs » du roi qui organisait à l’époque la mise en scène de ces
funérailles royales !
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