mardi 20 septembre 2011

Bouddha qui saute par-dessus le mur !

Ce mets du Fujian, « Bouddha qui saute par-dessus le mur », en chinois Fotiaoqiang 佛跳墙, est un grand classique de la haute gastronomie chinoise. Son histoire remonte à la dynastie des Qing lors de la deuxième année du règne de l’empereur Guangxu. Son appellation actuelle fait référence aux vers d’un lettré de l’époque qui l’avait dégusté, séduit par la recette “坛启荤香飘四邻,佛闻弃禅跳墙来”: le fumet de ce mets est tellement exceptionnel que, passant devant le mur de la résidence où il était en train d’être dégusté, Bouddha ne résistait pas et sauta par-dessus le mur pour se joindre au festin !

Cette jolie métaphore pointe le caractère exceptionnel des ingrédients qui composent la recette, tous représentatifs des ingrédients de la haute gastronomie chinoise : holothuries de mer, abalones, ailerons de requin, poulet, canard, noix de saint jacques séchées, mâchoires de poissons séchées, crevettes, jambon de Jinhua…La recette originale exige à minima 18 ingrédients principaux et 12 ingrédients auxiliaires comme les champignons parfumés séchés, les pousses de bambou, les baies de goji, chair de longane séchée… La mise en goût s’effectue avec de la sauce de soja, de la sauce d’huître, du gingembre, de l’ail, de l’alcool de Shaoxing, du bouillon de volaille. Après des préparations primaires complexes (nettoyage et pré-cuisson des holothuries de mer par exemple) et de pré-cuissons, les différents ingrédients sont mis dans une jarre en terre ayant servi à contenir de l’alcool de riz de Shaoxing, en couche alternée, couvert d’alcool de Shaoxing coupé avec du bouillon, scellée avec une feuille de lotus couverte de boue. La préparation subit alors une cuisson lente, très lente à très basse température pendant au moins cinq heures !

La version originale de la recette avait des ingrédients moins prestigieux. En effet, lorsque le directeur des finances de la ville de Fuzhou (dont l’histoire a oublié le nom) recevait le vice-gouverneur de la province de Fujian Zhou Lian周莲, il demanda à sa femme de se mettre aux fourneaux pour honorer son hôte. La cuisson à feu très doux de ce que la cuisine avait de meilleur dans une jarre mouillé à l’alcool de Shaoxing était née. Les ingrédients de l’époque étaient du poulet, du canard, des œufs de caille, des tripes. Le vice-gouverneur Zhou Lian fin gourmet, apprécia le plat et le baptisait fushouquan福寿全 : bonheur et longévité complète ! La diffusion de la recette à l’extérieur était faite par le cuisinier du directeur des finances, un certain Zheng Chunfa郑春发. Il copiait et améliorait la recette de son maître qu’il proposait dans son restaurant. Cette recette de « bonheur et longévité complète » rendit son restaurant célèbre dans la ville de Fuzhou. La rencontre de cette recette avec un lettré d’un soir change à jamais son appellation !

Aujourd’hui, ce Fotiaoqiang 佛跳墙 vient à votre rencontre au restaurant Shang Palace du Shangri La Paris !



Ce mets est un luxe !

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