En France, aucun diplôme de restaurateur n’est exigé pour ouvrir un lieu de restauration. De ce fait, comment faire la différence dans les restaurants entre les vrais passionnés, les vrais professionnels de ceux qui prétendent l’être ? Comment être sûre que les plats cuisinés servis sont issus d’une réelle fabrication « maison », issus de produits de qualité, avec un personnel compétent, dans des conditions d’hygiène acceptables ? En s’inspirant du label « artisan boulanger » qui garantit que le pain n’est pas de fabrication industrielle, le label « maître restaurateur » vient d’être né par décret du 14 septembre 2007.
C'est après l'échec des négociations européennes sur une TVA réduite à 5,5% pour la restauration que l'idée de valoriser les véritables restaurateurs a germé. Car sur 100.000 restaurants en France, seuls 15 à 20.000 pourraient revendiquer le titre de "maître restaurateur" qui implique, notamment, de travailler des produits frais, cuisinés sur place, de proposer au moins quatre plats différents pour les entrées, les plats et les desserts, d'avoir un personnel qualifié en cuisine et en salle ainsi qu'un accueil agréable pour les clients.
Voilà pour l'aspect marketing. Mais ce titre de "maître restaurateur" va également permettre à ceux qui l'auront de bénéficier d'un crédit d'impôt de 50% pour tous les travaux de modernisation de leur établissement, nouveaux matériels de cuisine, changement de décoration... Un plafond a été fixé à 30.000 euros sur trois ans. Toute dépense engagée depuis le 1er janvier 2007 pourra être comptabilisée.
Ce sont les préfets qui distribueront les précieux titres aux restaurateurs qui en auront fait la demande et auront eu l'aval d'un organisme de certification (Veritas, Afnor...). Les macarons et autres logos, qui restent à inventer, seront apposés à l'entrée des établissements et seront attribués pour une période de trois ans. L'objectif de Renaud Dutreil est de délivrer 10.000 titres de "maître restaurateur" d'ici la fin de l'année.
Ci-après, le décret dans sa version intégrale.
MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE L’EMPLOI
Décret no 2007-1359 du 14 septembre 2007 relatif au titre de maître-restaurateur
NOR : ECEA0754241D
Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l’économie, des finances et de l’emploi,
Vu le code de la consommation, notamment son article R. 115-5 ;
Vu le code de l’éducation, notamment ses articles R. 335-12 et suivants ;
Vu le code général des impôts, notamment son article 244 quater Q ;
Vu le décret no 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l’action et à l’organisation des pouvoirs de l’Etat dans les régions et départements, modifié par le décret no 2005-1621 du 22 décembre 2005 ;
Le Conseil d’Etat (section des finances) entendu, Décrète :
Art. 1er. − I. − Le titre de maître-restaurateur, institué par l’article 244 quater Q du code général des
impôts, est délivré aux personnes physiques qui dirigent, au titre de l’une des fonctions mentionnées au 2 du I du même article, une entreprise exploitant un fonds de commerce de restauration.
II. − Pour obtenir le titre de maître-restaurateur, le dirigeant doit justifier de l’une des conditions suivantes :
1o Etre titulaire du brevet professionnel, du baccalauréat professionnel ou d’une certification de niveau IV ou supérieur enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles ;
2o Etre titulaire du certificat d’aptitude professionnelle, du brevet d’études professionnelles ou d’une
certification de même niveau enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles, accompagné d’une expérience professionnelle de cinq ans en qualité de dirigeant d’une entreprise exploitant un fonds de commerce de restauration ;
3o Justifier, en tant que dirigeant d’une entreprise exploitant un fonds de commerce de restauration, d’une expérience professionnelle de dix ans si le dirigeant n’est pas titulaire de l’un des diplômes, titres ou certificats mentionnés au 1o ou au 2o ;
4o Justifier au minimum d’une expérience professionnelle de cinq ans en tant que dirigeant d’une entreprise exploitant un fonds de commerce de restauration s’il n’est pas titulaire de l’un des diplômes, titres ou certificats mentionnés au 1o ou au 2o et ne possède pas les qualifications professionnelles requises à condition que l’activité de chaque établissement soit placée sous le contrôle technique, effectif et permanent, d’un cuisinier détenant un diplôme, un titre ou un certificat de qualification professionnelle délivré pour l’exercice du métier de cuisinier, enregistré au répertoire national des certifications professionnelles et classé à un niveau V ou à un niveau supérieur et justifiant, lorsqu’elle est requise, d’une expérience professionnelle minimale de cinq ans.
III. − Les dispositions précédentes sont indistinctement applicables aux ressortissants d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen. Ces ressortissants justifient, au titre de leur fonction de dirigeant, de la détention d’un diplôme, d’un titre ou d’un certificat obtenu dans l’un de ces Etats autres que la France et préparant à l’exercice de métiers comparables et, lorsqu’elle est requise, d’une expérience professionnelle acquise dans des conditions équivalentes ou, à défaut de la détention d’un tel diplôme, titre ou certificat, d’une expérience professionnelle de dix ans acquise dans des conditions équivalentes. Pour l’application du 4o du II, ces ressortissants justifient, au titre de leur fonction de cuisinier, de la détention de l’un des diplômes, titres ou certificats mentionnés à la phrase précédente et, lorsqu’elle est requise, d’une expérience professionnelle minimale de cinq ans acquise dans des conditions équivalentes.
Les conditions dans lesquelles ces justifications sont apportées sont fixées par arrêté du ministre chargé du commerce.
Art. 2. − Le titulaire du titre mentionné à l’article 1er doit exercer personnellement l’activité de cuisinier ou, à défaut, superviser personnellement celle-ci.
Dans le cas où il est fait application du 4o du II de l’article 1er et lorsque le cuisinier mentionné à cet alinéa cesse définitivement son activité, le maître-restaurateur en informe immédiatement par écrit le préfet du département mentionné au premier alinéa de l’article 4. Dans un délai de trente jours à compter du départ de ce cuisinier, il lui signale son remplacement par une personne satisfaisant aux mêmes conditions de qualification et d’expérience professionnelle prévues à cet alinéa. Si, à l’expiration de ce délai, aucun remplacement n’est intervenu ou si les conditions mentionnées à la phrase précédente ne sont pas satisfaites, le préfet du département peut prononcer la déchéance du titre de maître-restaurateur.
Art. 3. − Les conditions d’exercice de l’activité doivent correspondre dans chaque établissement aux normes d’aménagement et de fonctionnement prévues dans le cahier des charges relatif au titre de maître-restaurateur.
Ce cahier des charges, approuvé par arrêté conjoint des ministres chargés du commerce et du tourisme, détermine à cette fin les critères de qualité que chaque établissement doit respecter dans les domaines suivants :
1o Origine et transformation des produits utilisés ;
2o Relations avec les clients ;
3o Aménagements intérieurs ;
4o Equipements extérieurs ;
5o Règles d’hygiène et de sécurité.
Un audit externe est réalisé, aux frais du candidat, par l’un des organismes certificateurs mentionnés à l’article R. 115-5 du code de la consommation et qu’il choisit parmi ceux figurant sur une liste établie par arrêté du ministre chargé du commerce. Cette liste comporte exclusivement les organismes qui ont déposé leur candidature en vue de leur inscription sur cette liste et qui justifient d’une compétence dans le domaine de la restauration.
Cet audit donne lieu à la rédaction d’un rapport ayant pour objet de vérifier la conformité de l’établissement au cahier des charges. Ce rapport contient des conclusions motivées et précise si chacun des critères énumérés par le cahier des charges est satisfait.
Art. 4. − Le titre de maître-restaurateur est délivré pour une durée de quatre ans, par le préfet du département du lieu de l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés du principal établissement du candidat ou de l’entreprise qu’il dirige.
Le préfet vérifie le respect des conditions prévues aux articles 1er et 2 et se prononce au vu des conclusions motivées de l’audit externe prévu à l’article 3. Le non-respect de l’un des critères du cahier des charges fait obstacle à la délivrance du titre de maître-restaurateur.
En cas de rejet de la demande d’octroi du titre, la décision notifiée au candidat mentionne la possibilité de former le recours prévu à l’article 5.
Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’intérieur, du commerce et du tourisme précise la composition des dossiers de candidature ainsi que la procédure d’instruction des demandes.
Art. 5. − I. − Il est créé, dans chaque région ou dans la collectivité territoriale de Corse, une commission régionale de recours pour l’attribution du titre de maître-restaurateur.
Cette commission, instituée par arrêté du préfet de région ou, dans la collectivité territoriale de Corse, du préfet de Corse, comprend :
1o Le préfet de région, ou, dans la collectivité territoriale de Corse, le préfet de Corse, ou son représentant, président ;
2o Le délégué régional au commerce et à l’artisanat ou son représentant ;
3o Le délégué régional au tourisme ou son représentant ;
4o Le directeur régional de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou son
représentant ;
5o Quatre représentants titulaires désignés, ainsi que leurs suppléants, par le préfet de région ou, dans la
collectivité territoriale de Corse, par le préfet de Corse, sur proposition des organisations professionnelles du secteur de la restauration représentatives au niveau national. Les représentants de ces organisations sont nommés pour une durée de cinq ans renouvelable.
En cas de partage des voix, la voix du président ou de son représentant est prépondérante.
Si un représentant des organisations professionnelles démissionne, décède, est démis de son mandat ou cesse en cours de mandat d’exercer les fonctions en raison desquelles il a été nommé, il est pourvu à son remplacement pour la durée de son mandat restant à courir.
Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’intérieur, du commerce et du tourisme précise les modalités de fonctionnement de la commission régionale.
II. − Le recours présenté à la commission régionale de recours mentionnée au I doit, à peine
d’irrecevabilité, être formé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de rejet.
Art. 6. − Deux mois au moins avant le terme de la période de validité de quatre ans du titre de maître restaurateur, celui-ci peut faire l’objet d’une demande de renouvellement selon la procédure prévue à l’article 4.
Art. 7. − La ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, la ministre de l’économie, des finances et de l’emploi et le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 14 septembre 2007.
FRANÇOIS FILLON
Par le Premier ministre :
La ministre de l’économie, des finances et de l’emploi, CHRISTINE LAGARDE
La ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, MICHÈLE ALLIOT-MARIE
Le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, ERIC WOERTH